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MALI

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Le Mali, avec une superficie de 1 240 000 kilomètres carrés, est le plus vaste État d’Afrique de l’Ouest. Sa population peut être estimée à 8,5 millions d’habitants en 1993. La capitale est Bamako (700 000 habitants environ). Privé d’accès à la mer et victime de la sécheresse qu’ont connue les pays du Sahel, le Mali est l’un des pays les plus pauvres du monde, selon la classification de la Banque mondiale. On peut cependant le considérer comme possédant l’une des sociétés les plus intéressantes d’Afrique; il est en effet, de par sa situation géographique, un carrefour entre diverses civilisations.

1. Le cadre géographique: un pays divers aux ressources précaires

Cet immense pays frappe l’observateur par la variété de sa population, de ses paysages, ainsi que par la diversité de ses ressources et de ses activités commerciales. On peut cependant se demander si celles-ci permettent d’assurer un véritable développement économique et social.

Les populations: caractéristiques ethniques, religieuses et démographiques

Le Mali est le point de rencontre de plusieurs cultures. Il est difficile, étant donné l’absence de statistiques officielles sur les appartenances ethniques, de connaître l’importance exacte de chaque groupe. On peut toutefois avancer des ordres de grandeur et avoir une idée de la répartition ethnique globale du pays. Le groupe dominant est celui des Mandingues, qui regroupent 40 p. 100 de la population malienne. Mais cet ensemble mandingue recouvre au moins trois rameaux différents: les Bambara, de loin les plus nombreux (environ 80 p. 100), qui occupent un triangle dont le sommet touche la Mauritanie et la base la Côte-d’Ivoire. Ils dominent depuis l’indépendance la vie politique et les structures administratives du pays. Les Malinke, majoritaires dans la région de Kita, et les Dioula, connus pour leurs activités commerciales et présents un peu partout dans le pays, constituent à peu près 20 p. 100 de cette population mandingue. Le groupe dit soudanien (environ 20 p. 100 de la population totale) est composé de Songhay (vallée du fleuve Niger), de Dogon (région de Bandiagara), rendus célèbres grâce aux études de l’ethnologue Marcel Griaule, de Sarakholé, appelés aussi Soninké (région de Ségou et Nioro) et de Bozo (région de Mopti). Le groupe dit voltaïque (12 p. 100) comprend les Senoufo (région de Sikasso), les Bobo (région de San) et les Mossi (région frontière du Burkina Faso). Les Peuls (environ 630 000) sont un groupe à l’origine incertaine. Ce sont surtout traditionnellement des nomades, souvent sédentarisés, vivant dans les régions de Mopti, Ségou et Sikasso. Les vastes ensembles du nord sont occupés par des Touaregs, des Maures et des Arabes. Les premiers, de langue berbère (tamacheq), sont les plus nombreux (environ 270 000). Ils sont pasteurs nomades ou commerçants. Ils ont été très affectés par la sécheresse qui a marqué régulièrement la région depuis le début des années soixante-dix. Ils sont mal intégrés dans l’ensemble malien. Après avoir opposé une farouche résistance à la pénétration coloniale, ils se sont soulevés à plusieurs reprises contre le gouvernement central (1961-1962, 1990-1992). Plus récemment, celui-ci a essayé de les fixer, pour leur porter secours durant les périodes de famine, mais aussi pour mieux les contrôler. Les Maures, eux, sont moins nombreux (environ 75 000). Ils parlent un dialecte arabe (hassanya). Ils sont surtout regroupés dans le voisinage du Hodh mauritanien. Comme les Touaregs, ils sont essentiellement pasteurs et commerçants, et connaissent les mêmes problèmes de marginalisation. Les Arabes (environ 100 000) comprennent deux groupes principaux: les Bérabich et les Kounta. Chaque groupe ethnique a sa propre langue, cependant le bambara fait, dans plusieurs régions, fonction de langue véhiculaire. Le français, lui, est langue officielle. Au-delà de cette diversité, on remarque cependant au Mali une certaine unité religieuse, puisque la population est musulmane à 90 p. 100. Cette religion est néanmoins souvent associée à des pratiques animistes. Présent depuis le XIe siècle, l’islam est en progression constante. Des poches animistes existent cependant, notamment chez les Dogon et les Senoufo. La plupart des musulmans maliens appartiennent à des confréries, principalement la Qadiriyya et la Tijaniyya. La première est la plus ancienne et a surtout recruté dans des milieux culturellement proches du monde arabe. La seconde est plus indigène. Elle s’est répandue au XIXe siècle sous l’action d’El Hadj Omar Tall. Plus récemment, ces deux confréries ont été concurrencées par la Hamalliyya, secte dissidente de la Tijaniyya, dont le fondateur, Cheikh Hamallah, fut exilé par les autorités coloniales en France où il mourut (1943).

Enfin, un mouvement réformiste, critique du confrérisme, s’est développé à partir des années trente. Connu sous le nom de Wahabiyya (du nom du mouvement réformiste d’Arabie Saoudite au XVIIIe siècle), il a des adeptes en milieu urbain et notamment dans les communautés dioula. Il a été à l’origine d’une promotion et d’une rénovation spectaculaires de l’enseignement arabe. En 1980, le gouvernement, dans un souci d’unification de ces différentes communautés, mais aussi pour endiguer les initiatives islamistes trop radicales, suscita la création de l’Association malienne pour l’unité et le progrès de l’islam (A.M.U.P.I.). Les chrétiens sont une petite minorité (un peu plus de 1 p. 100 de la population totale), essentiellement des catholiques présents surtout chez les Bobo et les Dogon. D’un point de vue démographique, le Mali se caractérise schématiquement par les éléments suivants: – une population jeune (les moins de quinze ans représentent près de 40 p. 100 de la population); – une répartition spatiale très déséquilibrée: le Nord et le Centre (60 p. 100 du territoire) ne comptent que 10 p. 100 de la population qui est concentrée au sud; – l’importance des migrations vers les villes (Bamako), les pays voisins (en Côte-d’Ivoire, les Maliens constituent 20 p. 100 de la population étrangère) et la France (surtout Sarakholé). Ces mouvements de population sont en grande partie liés à la détérioration de la situation économique et à la sécheresse.

Les grands ensembles régionaux

On distingue quatre zones géographiques.

Le domaine saharien couvre le nord du pays. Les pluies y sont irrégulières, rares (inférieures à 200 mm par an), et tombent sous forme de tornades. Ces pluies sont d’une efficacité biologique faible car elles n’imbibent pas profondément le sol. De plus, le vent accentue l’évaporation de l’eau. Cependant, ces précipitations peuvent permettre l’apparition d’un tapis herbacé qui peut nourrir temporairement les troupeaux des tribus nomades. Le domaine sahélien (centre du pays) connaît une pluviométrie variable (de 200 à 700 mm). Sa caractéristique essentielle est la longueur de la saison sèche et la période de l’hivernage (3 ou 4 mois: de juin à septembre). Au nord, le couvert végétal est constitué de petits arbres rabougris et d’acacias. Cette steppe est le pâturage des chameaux, bœufs, moutons ou chèvres des nomades, Maures et Touaregs. Le sud du Sahel possède, lui, une couverture herbacée plus fournie. l’agriculture vivrière y coexiste avec l’élevage. Le domaine soudanien et soudano-guinéen est situé dans le Sud. Il a une pluviométrie comprise entre 750 et 1 300 mm. La végétation est constituée de savanes et de forêts claires. La partie méridionale de cette zone (sud de Bamako) est le domaine de prédilection de la mouche tsé-tsé. Le delta intérieur du Niger, enfin, est une région originale de 300 kilomètres de longueur et de 100 kilomètres de largeur. En période de crue (octobre-décembre), elle apparaît comme une véritable mer intérieure en zone sahélienne. Cette situation a un effet modérateur sur le climat. Les sols hydromorphes y sont plus riches qu’ailleurs, mais saturés d’eau, leur drainage s’impose.

Des ressources fragiles

Le Mali est un pays pauvre parmi les pauvres. Selon un rapport des Nations unies de 1991, classant cent soixante pays du monde en fonction de leur richesse économique, le Mali se trouve à la cent cinquante-sixième place. Pays enclavé, ne disposant que de faibles ressources minérales et d’un secteur manufacturier embryonnaire, doté d’une agriculture particulièrement sensible aux aléas climatiques, le Mali non seulement n’a pas réussi à amorcer un développement économique, mais a du mal à nourrir sa population. De plus, des politiques économiques aventureuses, aboutissant à une hypertrophie et à une paralysie du secteur public et de l’administration, ont aggravé ces difficultés. Les cultures vivrières (mil, sorgho et, dans une moindre mesure, maïs) constituent la base de la nourriture de la population. Leur production est cependant irrégulière; elle varie de 500 000 à 1 700 000 tonnes. En moyenne, une année sur quatre est catastrophique, bien que l’on assiste à un certain redressement depuis 1986 (1 664 000 t en 1990). Le riz est cultivé dans la vallée du fleuve Niger, mais sa production est aléatoire, malgré quelques bonnes récoltes ces dernières années (303 000 t en 1990). Les cultures industrielles ont des résultats variables. L’arachide, très sensible aux conditions climatiques, produit entre 26 000 tonnes les mauvaises années (1983) et 205 000 les bonnes années (1975). Mais il faut noter que sa commercialisation échappe largement aux circuits officiels. La production cotonnière, elle, croit régulièrement (96 500 t en 1982, 175 000 t en 1985, 286 000 t en 1988, 294 000 t en 1990). Le coton et les produits textiles sont ainsi devenus la principale ressource d’exportation (42,5 p. 100 de la valeur des exportations en 1990). Mais les fluctuations du prix du coton sur le marché mondial ainsi qu’un certain déclin de la demande marquent les limitent de ce succès.

L’élevage représente la deuxième ressource d’exportation, malgré l’importante contrebande dont il fait l’objet. Il est pratiqué sur toute l’étendue du territoire et constitue la principale activité économique dans les régions du Nord. Très durement touché par la sécheresse (en 1972, puis au cours des années 1982-1985), le cheptel semble cependant s’être reconstitué depuis la fin des années quatre-vingt, sans toutefois parvenir à dépasser vraiment le niveau de 1971 (5,012 millions de bovins en 1971, 4,826 millions en 1989, 11,4 millions d’ovins en 1971, 11,5 millions en 1989). La pêche est une activité économique traditionnelle au Mali, qui est traversé par un réseau fluvial dense. Mais, comme beaucoup de secteurs de l’économie malienne, elle est très dépendante des conditions climatiques. Une partie de cette pêche est exportée vers les pays voisins (sous forme de poisson séché surtout). Les ressources minières ne permettent guère de compenser les difficultés de l’agriculture, de la pêche ou de l’élevage, bien que le sous-sol malien semble contenir des richesses non négligeables (fer, pétrole, uranium, notamment) mais difficilement exploitables à cause du manque d’infrastructure. En l’état actuel des choses, l’or est la principale production minière qui connaisse un développement significatif (les mines de Kalana en activité depuis 1984 ont produit 1 000 kg d’or en 1990). Les ressources hydrauliques paraissent plus prometteuses. Le barrage de Selingué sur le Sankarani alimente Bamako en électricité; celui de Manantoli sur le Bafing, lié aux projets de développement de la vallée du fleuve Sénégal, est appelé à favoriser l’autonomie énergétique du Mali et à donner une impulsion à l’agriculture irriguée. Le secteur manufacturier est peu développé (6 p. 100 du P.I.B.), très lié à l’agriculture et à l’élevage (huileries, industries textiles, tanneries, notamment) et handicapé par de grandes difficultés de gestion. Mais, depuis 1989, dans le cadre d’un programme d’ajustement structurel, un plan de privatisation d’un certain nombre d’entreprises publiques a été mis au point. Au regard de ces données, on comprendra que le bilan économique du pays ne soit guère brillant et que le revenu par tête d’habitant y soit l’un des plus faibles du monde (130 dollars en 1990). Dans ces conditions, le Mali est fort dépendant de financements extérieurs: ceux-ci représentaient 51 p. 100 des financements totaux à l’époque de l’indépendance; trente ans plus tard, ils frôlent les 90 p. 100. La France est, de loin, le plus gros pourvoyeur d’aide bilatérale. La dette extérieure, qui était de 1,41 milliard de dollars en 1981, s’élevait à 2,43 milliards en 1990.

2. Des empires médiévaux au Mali moderne

Malgré l’état actuel précaire de son économie, le Mali a une histoire fort riche. Situé au cœur de l’Afrique occidentale et sur les grandes routes du commerce transsaharien, il a été le centre d’importantes constructions politiques. Devenu colonie française, sous le nom de Soudan, il fut l’un des territoires clés de l’Afrique-Occidentale française, avant de devenir l’un des hauts lieux du nationalisme africain.

Les grands empires soudanais

On a trouvé sur le territoire du Mali plusieurs sites datant du paléolithique et du néolithique, avec des outillages de pierre taillée ou polie. Les restes osseux sont cependant peu nombreux (nécropole dite de la Frontière au nord de Tessalit, par exemple). On est beaucoup mieux renseigné sur les États médiévaux qui ont fasciné les voyageurs arabes et européens. L’empire du Ghana est signalé et décrit dans des textes arabes dès le VIIIe siècle comme le pays de l’or. Il était compris entre les fleuves Niger et Sénégal, et était le centre d’un intense trafic (sel, or) reliant l’Afrique du Nord au continent noir. Les souverains (tunka) contrôlaient ce commerce grâce à une administration efficace et à une réglementation rigoureuse. Si les grands commerçants étaient des Arabes ou des Berbères, les intermédiaires, eux, étaient des Soninke (Sarakolé). Ainsi émergea une première classe de marchands locaux qui contribuèrent au développement de centres urbains. Au XIe siècle, les Berbères Almoravides entreprirent la conquête de cet empire animiste. En 1076, la capitale Kumbi-Saley fut saccagée. Les Soninke hostiles à l’islamisation se réfugièrent au sud. Mais la plus célèbre des formations politiques soudanaises fut sans aucun doute l’empire du Mali, si prestigieux que les dirigeants politiques modernes donnèrent son nom au nouvel État au moment de l’indépendance. On connaît relativement bien, grâce aux traditions orales mais aussi aux récits de voyageurs arabes, tels Al Bekri, Ibn Khaldun, Ibn Batuta ou Léon l’Africain, l’histoire de cet empire légendaire. Ce vaste ensemble politique se constitua à partir des chefferies mandingues du HautNiger, et notamment du clan des Keita, dont l’un des grands ancêtres, Baramendena, se convertit à l’islam (à la suite d’une sécheresse) en 1050. Il se rendit en pèlerinage à La Mecque et à son retour prit le titre de sultan. Mais ce fut surtout sous l’impulsion de Soundiata Keita, dont les griots chantent encore aujourd’hui les louanges, que l’empire mandingue s’organisa, s’agrandit et assura son hégémonie sur la région. Il régna de 1230 à 1255 et installa sa capitale à l’emplacement du village de Niani, qui prit le nom de Mali. Il favorisa l’exploitation de l’or, le commerce et le développement de cultures nouvelles, notamment du coton. Sous Kankan Moussa (1312-1337), le Mali atteignit son apogée. L’influence de l’empire allait alors de l’océan Atlantique à l’ouest jusqu’aux confins du Sahara au nord et aux forêts du golfe de Guinée au sud. Le pèlerinage de ce souverain à La Mecque est resté célèbre dans les chroniques arabes de l’époque. La puissance économique et commerciale du Mali était alors considérable et y était garantie par des forces de sécurité qui comptaient plus de 100 000 hommes. De très nombreuses caravanes assuraient l’échange des marchandises contre or et esclaves. Ce contexte permit le développement de villes comme Gao, Djenné ou Tombouctou. Avec le déclin de l’empire du Mali, à la suite de difficultés de succession et de la poussée touarègue en particulier, le royaume Songhay prit un essor remarquable. Sonni Ali fonda pendant les vingt-huit années de son règne (1464-1492) un empire qui allait de Kebbi (au Niger) à Ségou; la région retrouva une grande expansion économique, et la culture islamique fit des progrès considérables. Grâce à l’appui du pouvoir politique et à la générosité des riches commerçants, une aristocratie du savoir assura le rayonnement intellectuel des écoles et universités du Soudan, surtout de Tombouctou. Mais, en 1591, la conquête marocaine mit fin à cette brillante période. Aux XVIIe et XVIIIe siècles, on assista à la naissance d’États guerriers (Ségou, Kaarta) fondés principalement sur le commerce des esclaves et dont les souverains prenaient beaucoup de liberté avec les principes islamiques. Face à ce déclin, un renouveau politico-religieux musulman se développa dès le début du XVIIIe siècle sous la direction de Cheikhou Amadou (1775-1844). Celui-ci fit la guerre sainte contre le roi du Macina et ses alliés de Ségou. Il instaura l’État théocratique de Hamdallaye. Un peu plus tard, un autre chef religieux originaire du Fouta Toro sénégalais, El Hadj Omar Tall (1797-1864), khalife de la confrérie Tijaniyya, se lança à son tour dans une guerre sainte pour établir l’hégémonie de l’islam au Soudan. Après avoir soumis les royaumes de Kaarta et de Ségou, il mourut mystérieusement dans les falaises de Bandiagara. Son fils, Amadou, lui succéda, mais ne put tenir tête aux troupes françaises qui prirent Ségou en 1890. La période coloniale commençait.

Du Soudan français au Mali actuel

Les Européens avaient depuis longtemps tenté de pénétrer le Soudan. Le premier d’entre eux aurait été un noble toulousain, Anselme d’Isalguier, qui aurait vécu à Gao au XVe siècle et épousé une princesse songhay nommée Salou Casaïs. En 1470, un voyageur florentin, Beneditto Dei, visita Tombouctou, et, en 1618, un Français natif des Sables-d’Olonne, Paul Imbert, membre d’une expédition marocaine, séjourna dans la «cité mystérieuse». Au XVIIIe siècle, plusieurs explorateurs britanniques, tels le major Daniel Houghton, Mungo Park et le major Alexander Gordon Laing, parcourent la région. En 1828, le Français René Caillié atteint Tombouctou et relate ses aventures dans son célèbre Journal de voyage (publié en 1830). À cette période d’exploration succéda celle de la pénétration commerciale puis militaire. En février 1883, les troupes françaises atteignent le fleuve Niger. Après avoir vaincu Amadou, les colonnes françaises arrivent à Tombouctou. La pacification était quasi achevée. Le chef-lieu de la colonie est d’abord installé à Kayes. En 1895, le Soudan français devient territoire de l’Afrique-Occidentale française. En 1907, Bamako, située au carrefour de grands axes de communication, est érigée en capitale de la colonie. En 1947, après des modifications successives de frontières, le Soudan prend la forme qu’on lui connaît actuellement. Afin d’éviter l’isolement économique de leur colonie, les Français s’appliquent à développer les moyens de communication. Le chemin de fer Kayes-Niger est réalisé entre 1881 et 1904, et raccordé à Dakar en 1924. Puis l’administration s’attaque à l’aménagement du Niger. En 1932 est créé l’Office du Niger, établissement public destiné à promouvoir une politique agricole ambitieuse, qui n’eut pas cependant les résultats escomptés. Les cultures industrielles, notamment, furent gravement atteintes par la crise de 1929-1930. Lors de la guerre de 1939-1945, comme lors de la guerre de 1914-1918, le Soudan envoya sur les fronts européens de très nombreux soldats (les fameux «tirailleurs sénégalais») et dut fournir en vivres et argent un effort de solidarité particulièrement lourd. Cette dette de guerre et de sang ne fut pas étrangère à la montée du mouvement nationaliste. En 1945, deux enseignants, Modibo Keita et Mamadou Konate, fondent le Bloc soudanais. L’année suivante, ce mouvement devient, sous le nom d’Union soudanaise, une section du grand mouvement fédéral, le Rassemblement démocratique africain (R.D.A.). Le congrès constitutif du mouvement, animé principalement par le leader ivoirien Houphouët-Boigny et par Modibo Keita, se tint à Bamako le 18 octobre 1946. Au fil des années, l’U.S.-R.D.A. consolide son assise politique. Au lendemain de la loi-cadre de 1956 (dite loi Defferre), qui dote les territoires de l’A.-O.F. et de l’A.-E.F. d’une certaine autonomie, les élections donnent une très large majorité à l’U.S.-R.D.A. au Soudan. Après le référendum sur la communauté franco-africaine (28 sept. 1959), les leaders soudanais s’appliquent à mettre en place un projet de fédération avec les autres territoires de l’ex-A.-O.F. Cependant, en définitive seul le Sénégal accepte de se joindre au Soudan dans une éphémère fédération du Mali. En effet, le 26 septembre 1960, soit trois mois après avoir obtenu son indépendance, la fédération éclate. Les différences idéologiques entre leaders soudanais, plus radicaux, et leaders sénégalais, plus modérés, expliquent en grande partie cet échec. Le Mali accède alors seul à l’indépendance, sous la houlette de Modibo Keita, qui dirigera le pays pendant huit ans.

3. Le Mali indépendant: expériences autoritaires et nouvelle donne démocratique

Depuis l’indépendance jusqu’à 1990, année qui verra l’émergence d’un pluralisme politique, le Mali a vécu sous deux régimes autoritaires: l’un de type socialiste, sous la direction de Modibo Keita, l’autre de type militaire, sous la direction de Moussa Traoré.

Le socialisme de Modibo Keita

La première République du Mali fut marquée par une tentative de transformation radicale de la société: il s’agissait de s’affranchir des structures laissées par la colonisation, et d’affirmer l’indépendance du pays. Le parti de Modibo Keita, l’U.S.-R.D.A., devint parti unique de fait. Il était censé jouer un rôle de premier plan dans la construction du socialisme: c’était en son sein qu’étaient définies les grandes options économiques, sociales et politiques; c’était lui qui était chargé d’encadrer la population. Dès l’indépendance, le régime élabora une politique économique ambitieuse qui prévoyait un taux de croissance annuel de 8 p. 100 et reposait sur la création de sociétés d’État. Ainsi furent constitués la Somiex (Société malienne d’import-export), qui avait le monopole de l’import-export, l’O.P.A.M. (Office des produits alimentaires du Mali), qui disposait du monopole d’achat et de distribution des céréales, et Air Mali et la Régie des transports du Mali. Pour ce qui était de l’agriculture, l’accent fut mis sur la mise en place de coopératives et de groupements ruraux de secours mutuel, encadrés par le parti. On attendait de ces réformes qu’elles permettent de dégager des surplus de nature à financer l’industrialisation. Dans le domaine monétaire et bancaire, le régime chercha à se défaire de l’influence française: le système bancaire fut nationalisé et le franc malien quitta la zone franc. Cependant, cette politique se solda par un échec retentissant. Les sociétés d’État devinrent un gouffre financier et aboutirent à une bureaucratisation stérile de la vie économique pour le seul profit d’une classe pléthorique de fonctionnaires. La production agricole stagna, et l’État dut avoir recours à d’importants achats à l’étranger, déséquilibrant ainsi la balance des paiements et la balance commerciale. L’aide, certes substantielle, mais souvent mal adaptée, des pays de l’Est ne suffit pas à pallier ces difficultés. Ce contexte explique que, malgré le prestige international de son leader qui était incontestablement une grande figure du nationalisme africain, le régime socialiste ait été confronté à des contestations grandissantes: révoltes des commerçants (1961), rébellion touarègue (1963), conflits internes au sein du parti, sans parler d’un mécontentement général croissant aussi bien en milieu rural que dans les villes. Le gouvernement répondit par la répression et la radicalisation «révolutionnaire». Des purges furent menées dans le parti et l’administration. Malgré une tentative de rapprochement avec la France, notamment sur le plan monétaire, le régime se replia sur lui-même: dissolution de l’Assemblée nationale (janv. 1968), puis du bureau politique de l’U.S.-R.D.A. (sept. 1968). C’est dans ce climat d’insécurité qu’une junte militaire renverse le gouvernement le 19 novembre 1968. Le président Keita est arrêté. Il mourra en résidence surveillée en 1977 dans des conditions non élucidées.

Le régime militaire de Moussa Traoré

Un comité militaire de libération nationale (C.M.L.N.) prend en main les affaires du pays. Il est dirigé par un sous-lieutenant de trente-deux ans (qui deviendra vite général), originaire de la région de Kayes et formé au collège militaire de Fréjus. Les militaires annoncent l’établissement d’un «ordre nouveau». S’ils déclarent ne pas renoncer à l’option socialiste, ils proclament leur volonté d’assainir les finances de l’État, de lutter contre la corruption et de s’en remettre au suffrage populaire. Cependant, l’évolution du nouveau régime montre que la réalisation de ces objectifs se heurta à de nombreux problèmes. La démocratisation ne fut qu’un slogan. L’autoritarisme et la personnalisation du pouvoir dominèrent les vingt-deux ans du régime de Moussa Traoré. Si la constitution de 1960 fut rapidement abrogée, il fallut attendre six ans pour qu’un nouveau texte constitutionnel fût adopté (1974). Celui-ci, loin de prévoir une organisation démocratique des pouvoirs, privilégiait le rôle du président de la République et institutionnalisait le parti unique, qui ne fut créé que cinq ans plus tard. En effet, l’Union démocratique du peuple malien (U.D.P.M.) fut un pur produit des militaires, et son secrétaire général ne fut autre que Moussa Traoré. Les élections qui suivirent sa constitution accordèrent 99 p. 100 des voix au parti et à son chef. Ces succès artificiels cachaient mal l’isolement du pouvoir et les divisions qui apparurent au sein de la junte militaire. Des purges et arrestations successives permirent à Moussa Traoré d’éliminer ceux qu’il percevait comme des rivaux et d’agir en maître absolu. Mais ce mode de gouvernement ne rendit que plus aléatoire la légitimité d’un régime qui ne réussit guère à s’associer les principales forces sociales du pays. Le gouvernement eut notamment maille à partir avec les agents du secteur public et l’Union des travailleurs maliens, qui manifestèrent à plusieurs reprises leur mécontentement et leur volonté de préserver les «acquis du peuple» face aux tentatives de libéralisation économique et à l’établissement de mesures d’austérité demandées par le Fonds monétaire international à partir de 1981.

Le régime se heurta aussi aux enseignants, aux étudiants et aux élèves qui constituèrent le fer de lance de la contestation. Des émeutes, souvent sanglantes, éclatèrent (1979-1980, 1987, 1990-1991) qui mirent le gouvernement en danger et l’obligèrent à ouvrir un débat sur la question scolaire. Un autre défi auquel les militaires durent faire face fut le conflit frontalier avec le Burkina Faso, portant sur une étroite bande désertique de la région d’Agacher. La guerre qui opposa les deux pays à la fin de 1985 coûta fort cher eu égard aux ressources du pays. Mais le partage de la zone contestée à l’initiative de la Cour internationale de justice de La Haye (1986) semble avoir réglé le problème. Enfin, la question touarègue fut relancée dans le Nord, en mai 1990, à la suite du rapatriement d’Algérie, dans de très mauvaises conditions, de centaines de familles nomades qui avaient fui la sécheresse du début des années soixante-dix. L’agitation que provoqua cette situation chez les Touaregs se transforma en véritable rébellion devant la répression à laquelle se livra l’armée malienne. Celle-ci ne parvint pourtant pas à «pacifier» le Nord. Des négociations aboutirent à un premier accord de paix signé à Tamanrasset (Algérie) en janvier 1991 entre les mouvements touaregs et le gouvernement. Mais les tergiversations des autorités maliennes suscitèrent de nouveaux troubles. Il fallut attendre la chute de Moussa Traoré pour qu’un accord plus tangible fût accepté par les deux parties. L’accumulation de tant de problèmes a donc contribué à fragiliser un régime qui pâtit aussi des difficultés économiques et sociales nées des périodes de sécheresse que connut le pays depuis 1981. Mais ce fut surtout la vague démocratique qui se développa au Mali comme dans d’autres pays africains à la fin des années quatre-vingt, qui mit fin à trente ans d’expérience autoritaire.

Le difficile passage à la démocratie

Au Mali, les revendications démocratiques apparurent au grand jour à la fin de l’année 1990, avec la création de l’Alliance pour la démocratie au Mali (Adéma) et du Comité national d’initiative démocratique (C.N.I.D.). Les jeunes, notamment dans le cadre de l’Association des élèves et étudiants du Mali (A.E.E.M.), ont également joué un rôle essentiel dans cette mobilisation contre le régime de Moussa Traoré. Mêlant mots d’ordre corporatistes et exigences politiques plus globales, ils ont su doter leur mouvement d’une légitimité et d’une crédibilité très large dans la population, d’autant que la répression dont ils furent victimes fit d’eux des martyrs. Le 21 janvier 1991 en effet, une manifestation organisée par l’A.E.E.M. contre l’arrestation de son secrétaire général est brutalement réprimée par les forces de l’ordre. À partir de cet événement, le mécontentement s’amplifie: meetings et marches se multiplient, et en face les méthodes les plus radicales sont utilisées pour en finir avec les «agitateurs». Le bilan est particulièrement lourd: deux cent dix-neuf morts et neuf cent dix-sept blessés selon l’Association malienne des droits de l’homme. Le malaise est tel que, le 26 mars, le président Traoré dont l’intransigeance se révèle de plus en plus gênante, y compris au sein de l’armée, est arrêté par un groupe de parachutistes à l’aéroport de Bamako, à l’instigation du lieutenant-colonel Amadou Toumany Touré, ancien chef de la garde présidentielle, qui devient chef de l’État. Le nouveau responsable du Mali engage alors le dialogue avec les leaders de l’opposition. Il met sur pied un comité de transition pour le salut du peuple (C.T.S.P.), formé de personnalités civiles et militaires, chargé d’exercer le pouvoir en coordination avec un gouvernement provisoire. Celui-ci est dirigé par un ancien ministre de l’Économie, Soumana Sacko, dit Zorro, qui avait démissionné de façon spectaculaire en 1987 pour protester contre la corruption du régime, à la suite d’une affaire de trafic d’or. Les nouveaux responsables du Mali se lancent dans une politique de nettoyage de l’administration et des sociétés d’État. Ils entreprennent aussi d’enquêter sur les «crimes de sang» et les «crimes économiques» de l’ancien régime, répondant ainsi au vœu de kokadjé («transparence» en bambara) de l’opinion publique. En juillet-août 1991 se tient une conférence nationale qui définit un nouveau code électoral et une nouvelle constitution, élaborée sur le modèle français. Celle-ci est approuvée par référendum le 12 janvier 1992 à une large majorité (98,4 p. 100 des suffrages exprimés).

Au cours des premiers mois de l’année 1992 ont lieu une série d’élections, municipales, législatives, présidentielle, qui voient toutes la victoire de l’Adéma (76 sièges au Parlement sur un total de 129 sièges) sur ses deux principaux rivaux: l’ancien U.S.-R.D.A. et le C.N.I.D.; celui-ci avait pourtant joué un rôle actif dans la période de transition, mais la jeunesse de ses dirigeants, ainsi que le caractère intempestif de ses revendications ont certainement nui à son image. Une autre caractéristique de ces scrutins est la faible participation électorale (34,1 p. 100 des électeurs inscrits pour les élections municipales, 20,5 p. 100 au deuxième tour des législatives, 20,9 p. 100 au deuxième tour de la présidentielle). Cette absence de mobilisation électorale s’explique sans doute par le peu de différence qui existe entre les programmes proposés par les partis en concurrence. De façon plus générale, elle dénote le fossé qui sépare les luttes politiciennes de la vie quotidienne des citoyens ordinaires. Elle marque aussi la difficulté pour une pédagogie démocratique à pénétrer dans la culture politique d’une population largement analphabète et habituée à des méthodes autoritaires de gouvernement. Le nouveau président, Alpha Oumar Konaré, a été élu au deuxième tour avec 69,5 p. 100 des suffrages exprimés contre 30,5 p. 100 à son rival, Tiéoulé Konaté, l’un des deux candidats de l’U.S.-R.D.A. Né le 2 février 1946 à Kayes, docteur en histoire de l’Université de Varsovie, Alpha Oumar Konaré a été pendant deux ans ministre de la Jeunesse, de la Culture et des Arts sous Moussa Traoré. Ayant pris ses distances à l’égard du pouvoir, il se lança dans le journalisme (il fonda la revue Jamana, «la patrie» en bambara, puis le journal d’opposition Les Échos) et participa à la formation de l’une des associations qui contribua le plus à dénoncer les pratiques du régime de Moussa Traoré, l’Adéma, et qui se transforma en parti politique après les sanglants événements du début de 1991. Le 8 juin 1992, le président Alpha Oumar Konaré nomma comme Premier ministre Younoussi Touré, directeur pour le Mali de la Banque centrale des États d’Afrique de l’Ouest (B.C.E.A.O.) Ces changements ont considérablement modifié la configuration politique du pays. Il reste cependant que celui-ci est confronté aux mêmes problèmes économiques et politiques que sous le régime précédent.

Face à la question touarègue, les nouveaux responsables du Mali bénéficient certes des initiatives prises par le régime de transition. Celles-ci ont abouti à un «pacte national» signé le 11 avril 1992 avec les mouvements et fronts unifiés touaregs et prévoyant un «statut particulier» pour les régions du Nord. Mais l’explosion de nouvelles violences quelques mois plus tard montre que l’application de cet accord, malgré la politique d’ouverture réaffirmée par le président Konaré, demeure fragile. Enfin, le nouveau régime doit aussi compter avec la mobilisation d’une jeunesse soucieuse de son avenir et qui n’entend pas se laisser dessaisir de «sa» victoire, de syndicats prompts à dénoncer toute politique de libéralisation économique qui se ferait au détriment des salariés, et avec une armée qui craint d’être marginalisée. La condamnation à mort, en février 1993, de l’ancien président Moussa Traoré symbolise la fin d’une époque; mais cet acte n’en résout pas pour autant les questions économiques, sociales et politiques que le Mali démocratique doit affronter. Malgré tous ces handicaps, le Mali est resté fidèle à sa grande tradition culturelle. Des artistes comme les écrivains Amadou Hampaté Bâ (L’Étrange Destin de Wangrin, 1973), Issa Baba Traoré (Ombre du passé, 1972), Seydou Badiane (Le Sang des masques, 1976), Ibrahima Ly (Toiles d’araignée, 1982), ou le cinéaste Souleymane Cisse (Finye, «le vent», 1983; Yeelen, «la lumière», 1987, prix du jury au festival de Cannes) ont une réputation internationale, qui s’étend au-delà même de l’Afrique.

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